atrick POIVRE D'ARVOR - Monsieur le Président de la République, bonjour. LE PRESIDENT - Bonjour.
Patrick POIVRE D'ARVOR - Nous revoici dans le même dispositif que l'année dernière, avec mes consoeurs Elise LUCET et Béatrice SCHOENBERG pour vous interroger sur un grand nombre de sujets qui intéressent les Français : la situation économique de la France, les impôts, le SMIC, la sécurité, la lutte anti-terrorisme, la défense, l'environnement et bien sûr la politique, puisque depuis deux mois, vous avez un nouveau Premier ministre et depuis un mois, une nouvelle majorité. Et pour vous dire la vérité, aucun d'entre nous n'aurait imaginé, il y a un an, que l'on allait se retrouver face au même Président de la République, élu le mieux de la Vème République avec 82 % des voix et j'imagine que vous-même vous ne l'imaginiez pas peut être à ce point ? LE PRESIDENT - Monsieur POIVRE D'ARVOR, avant de répondre à votre question, comme nous sommes le 14 juillet, permettez-moi de saluer les Françaises et les Français pour la fête nationale ; de saluer aussi nos armées qui, à l'extérieur de nos frontières, font un travail admirable ; de saluer notamment celles et ceux qui ont défilé aujourd'hui, d'une façon très remarquable et, parmi eux, de dire un mot d'amitié pour les cadets de West-Point qui défilaient derrière le drapeau américain, parce qu'ils fêtaient leur bicentenaire en même temps, d'ailleurs que leurs camarades de Saint-Cyr ; de saluer aussi les pompiers de New-York qui ont été si extraordinaires le 11 septembre et qui étaient aujourd'hui présents parmi nous pour la fête nationale. Et enfin, d'évoquer notre Légion d'Honneur qui a, également, deux siècles. Alors, vous me demandez en quelque sorte ma réaction à la suite des élections. Je vous dirais que le temps, pour moi, n'est pas particulièrement à la satisfaction. Il est à la responsabilité et il est dans l'action. Les Français se sont exprimés, chacun a pu les entendre, je les ai entendus et je veux maintenant agir avec détermination et je dirais avec enthousiasme. Ils ont exprimé leurs inquiétudes, les espoirs. Il faut donner une nouvelle impulsion à la France et répondre aux Français. Nous avons, effectivement, vous l'avez évoqué, toutes sortes de problèmes, des problèmes internes de développement économique, de progrès social, de solidarité, de santé qui sont aussi des problèmes de lutte contre la pauvreté, de meilleure insertion des jeunes dans notre société. Nous avons une Europe qui, dans les deux ans qui viennent, va se transformer par son élargissement et par la transformation de ses institutions. Il faut que les Français comprennent, sachent, qu'elle est notre vision de l'Europe de demain et le rôle de la France dans cette Europe. Et il y a des problèmes internationaux qui sont, vous les avez également évoqués, qui sont graves. La France doit défendre ses intérêts mais aussi elle doit être au premier rang de ceux qui combattent pour la paix, pour la démocratie, de ceux qui combattent contre la pauvreté, pour la solidarité, pour la solidarité notamment avec l'Afrique, de ceux qui luttent aussi pour la sauvegarde d'un environnement qui est aujourd'hui dramatiquement en cause dans le monde pour les prochaines années, pour les prochains siècles. Donc, tout cela impose de grandes réflexions et cela impose surtout, je le répète, de la détermination et de l'enthousiasme et aussi un esprit collectif.
QUESTION - Pour reprendre ma question sur les conditions de votre réélection : cela vous impose donc une nouvelle responsabilité, vous nous le dites, celle évidemment de ne pas rater votre quinquennat et peut être aussi vous vous dites maintenant quelle trace vais-je laisser dans l'histoire, est-ce que vous n'avez pas déjà un nouveau chantier en tête ? LE PRESIDENT - Ce n'est pas un problème personnel, vous l'imaginez. La question que je me pose, c'est : allons-nous ensemble être aujourd'hui capables de répondre aux Français et de donner à la France la nouvelle impulsion dont elle a besoin.
QUESTION - Dans votre action, est-ce que vous penserez également aux sceptiques et à vos adversaires ? LE PRESIDENT - Oui, sans aucun doute et je crois que, je me permets de vous le dire, c'est une très très bonne question. Parce que je crois que l'on ne pourra pas redonner aux Français la confiance, on ne pourra pas rétablir la sécurité, la sûreté au sens le plus large du terme, on ne pourra pas restaurer le respect que nous nous devons les uns aux autres qui est une des faiblesses de notre société d'aujourd'hui un peu éclatée. On ne pourra pas respecter nos institutions ce qui est essentiel dans une démocratie, dans une République, sans le concours de chacun, quelles que soient par ailleurs ses options ou ses choix de toute nature, politiques, philosophiques, religieux. On ne pourra pas le faire non plus sans le concours de toutes ces associations qui irriguent aujourd'hui, souvent avec beaucoup de dévouement et d'intelligence, la société civile. Et on ne pourra pas le faire, vous avez raison de le souligner, si nous n'avons pas enfin -car ce n'est pas tellement notre tradition-, de bonnes pratiques républicaines notamment dans les rapports entre la majorité et l'opposition.
QUESTION - Monsieur le Président, puisque l'on parle d'adversaires, concernant Lionel JOSPIN, qu'avez-vous pensé de sa décision de quitter définitivement la scène politique ? LE PRESIDENT - Je me garderai bien d'avoir le moindre jugement. C'était sa décision.
QUESTION - Mais c'est une attitude plutôt rare. Est-ce que vous, par exemple, dans votre carrière politique, il vous est arrivé, après un échec, de penser à un moment : "je pourrais tout abandonner" ? LE PRESIDENT - Jugez le comportement qui a été le mien à l'aune de votre réflexion, ne me demandez pas de juger celui de M. Lionel JOSPIN.
QUESTION - Sur la concentration des pouvoirs qui, au fond, finalement devient importante puisque le Président vient d'un camp, le Premier ministre du même, l'Assemblée, le Sénat, vous voyez bien les critiques qui peuvent tourner autour de tout cela. Est-ce que vous y prendrez garde, est-ce que vous ferez attention à respecter quand même l'opposition ? LE PRESIDENT - Je viens de le dire à Madame SCHOENBERG, je crois qu'un changement de comportement doit commencer par un changement du comportement des élus et notamment au Parlement pour plus de respect les uns des autres, pour des pratiques républicaines, si j'ose dire civilisées, plus civilisées. Cela est tout à fait essentiel. C'est un élément qui permet ensuite aux Français d'avoir confiance.
QUESTION - Mais en ce qui concerne la concentration des pouvoirs. Vous êtes à l'Elysée pour cinq ans, vous avez une majorité absolue au Parlement, vous avez donc tous les moyens pour appliquer votre politique. Si malgré tout vous échouez, est-ce que vous considérez cela comme un échec personnel ou est-ce que vous considérez cela comme une impossibilité politique ? LE PRESIDENT - Ecoutez, Madame, ne nous jetez pas un mauvais sort. Je n'ai aucune intention d'échouer, je vous l'ai dit tout à l'heure, je veux mettre toute ma détermination, tout mon enthousiasme et permettez-moi de le dire, tout mon coeur, pour répondre, de façon concrète et positive, aux Français et à la France.
QUESTION - Et est-ce qu'il y aura des chantiers concrets, par exemple, qui pourraient marquer le quinquennat ? LE PRESIDENT - Qu'est-ce que vous appelez des chantiers ?
QUESTION - Des grands chantiers que vous pourriez décider de lancer ? QUESTION - Par exemple, la décentralisation ? LE PRESIDENT - Quand on parle des grands chantiers, en général, on pensait aux grandes réalisations architecturales qui ont marqué chacun des septennats précédents. Si c'est à cela que vous faites allusion, oui, je voudrais marquer ce quinquennat par trois grands chantiers mais qui ne sont pas de pierre. C'est d'abord la lutte contre l'insécurité routière. Je suis absolument horrifié par le fait que les routes françaises sont les plus dangereuses d'Europe. C'est ensuite le cancer qui, au-delà, naturellement, de l'attention qu'on doit avoir pour toutes les maladies, des maladies orphelines jusqu'au sida, c'est un véritable drame national qui exige un effort considérable, un effort de recherche, un effort de prévention et de dépistage, un effort de traitement, y compris de traitement psychologique des maladies. Et cela, c'est aussi une grande ambition que nous devons avoir. Le troisième chantier -si vous appelez cela des chantiers-, ce sont les handicapés qui, en France, n'ont pas encore trouvé leur place convenablement de façon digne. Et beaucoup de progrès reste à faire. Voilà les trois grands chantiers. Vous voyez, ils ne seront pas aux mains des architectes et, je l'espère, entre les mains des hommes et des femmes de coeur.
QUESTION - Et, pourtant, des premiers pas de l'élève RAFFARIN, du Premier ministre, Jean-Pierre RAFFARIN... LE PRESIDENT - Je trouve que ce gouvernement, sous l'impulsion du Premier ministre, a accompli en deux mois, beaucoup, beaucoup de progrès. Dans le sens de la lutte contre l'insécurité, a été mis en place le Conseil intérieur de sécurité. Un grand ministère de la sécurité intérieure avec une harmonisation et fort, pour la première fois, des forces de police et de gendarmerie, ce qui était indispensable, avec la création de groupements régionaux d'intervention et avec, surtout, les deux lois qui ont été élaborées, tout de même, très vite et conformément à ce que j'avais sou [1] [2] [3] [4] [5] [6] 下一页 |