Je me sentais un peu malade et j'aurais voulu partir. Le bruit me faisait mal. Mais d'un autre côté, je voulais profiter encore de la présence de Marie. Je ne sais pas combien de temps a passé. Marie m'a parlé de son travail et elle souriait sans arrêt. Le murmure, les cris, les conversations se croisaient. Le seul îlot de silence était à côté de moi dans ce petit jeune homme et cette vieille qui se regardaient. Peu à peu, on a emmené les Arabes. Presque tout le monde s'est tu dès que le premier est sorti. La petite vieille s'est rapprochée des barreaux et, au même moment, un gardien a fait signe à son fils. Il a dit : « Au revoir, maman » et elle a passé sa main entre deux barreaux pour lui faire un petit signe lent et prolongé. 我感到有些不舒服,真想走开。嘈杂声让我难受。但另一方面,我又想多看看玛丽。我不知道过了多少时间。玛丽跟我讲她的工作,她不住地微笑。低语声,喊叫声,谈话声交织成一片。唯有我身边那个矮小的年轻人和那个老太太之间是一个寂静的小孤岛,他们只是互相望着。渐渐地,阿拉伯人都被带走了。第一个人一走,几乎所有的人都不说话了。那个小老太太走近铁栏杆,这时,一个看守向她的儿子打了个手势。他说:“再见,妈妈。”她把手从两根铁栏杆间伸出来,慢慢地,持续地摆了摆。
Elle est partie pendant qu'un homme entrait, le chapeau à la main, et prenait sa place. On a introduit un prisonnier et ils se sont parlé avec animation, mais à demi-voix, parce que la pièce était redevenue silencieuse. On est venu chercher mon [109] voisin de droite et sa femme lui a dit sans baisser le ton comme si elle n'avait pas remarqué qu'il n'était plus nécessaire de crier : « Soigne-toi bien et fais attention. » Puis est venu mon tour. Marie a fait signe qu'elle m'embrassait. Je me suis retourné avant de disparaître. Elle était immobile, le visage écrasé contre la grille, avec le même sourire écartelé et crispé. 她一走,一个男人进来,手里拿着帽子,占了她留下的那块地方。这一边也有一个犯人被带了进来,他们热烈地谈了起来,但声音很小,因为大厅已经安静下来了。有人来叫我右边的那个人了,他老婆并没有放低声音,好像她没注意到已经不需要喊叫了:“保重,小心。”然后就该我了。玛丽做出吻我的姿势。我在出去之前又回了回头。她站着不动,脸紧紧地贴在铁栅栏上,还带着为难的、不自然的微笑。
C'est peu après qu'elle m'a écrit. Et c'est à partir de ce moment qu'ont commencé les choses dont je n'ai jamais aimé parler. De toute façon, il ne faut rien exagérer et cela m'a été plus facile qu'à d'autres. Au début de ma détention, pourtant, ce qui a été le plus dur, c'est que j'avais des pensées d'homme libre. Par exemple, l'envie me prenait d'être sur une plage et de descendre vers la mer. À imaginer le bruit des premières vagues sous la plante de mes pieds, l'entrée du corps dans l'eau et la délivrance que j'y trouvais, je sentais tout d'un coup combien les murs de ma prison étaient rapprochés. Mais cela dura quelques mois. Ensuite, je n'avais que des pensées de prisonnier. J'attendais la promenade quotidienne que je faisais dans la cour ou la visite de mon avocat. Je m'arrangeais très [110] bien avec le reste de mon temps. J'ai souvent pensé alors que si l'on m'avait fait vivre dans un tronc d'arbre sec, sans autre occupation que de regarder la fleur du ciel au-dessus de ma tête, je m'y serais peu à peu habitué. J'aurais attendu des passages d'oiseaux ou des rencontres de nuages comme j'attendais ici les curieuses cravates de mon avocat et comme, dans un autre monde, je patientais jusqu'au samedi pour étreindre le corps de Marie. Or, à bien réfléchir, je n'étais pas dans un arbre sec. Il y avait plus malheureux que moi. C'était d'ailleurs une idée de maman, et elle le répétait souvent, qu'on finissait par s'habituer à tout. 她的信是那以后不久写的。那些我从来也不喜欢讲的事情也是从这时候开始的。不管怎么说,不该有任何的夸大,这件事我做起来倒比别的事容易。在我被监禁的开始,最使我感到难以忍受的是,我还常有一些自由人的念头。例如,我想去海滩,朝大海走去。我想象着最先冲到我脚下的海浪的响声,身体跳进水里以及我所感到的解脱,这时我才一下子感到了牢房的四壁相距是多么的近。但这只持续了几个月。然后,我就只有囚徒的想法了。我等待着每日在院子里放风或我的律师来访。其余的时间,我也安排得很好。我常常想,如果让我住在一棵枯树干里,除了抬头看看天上的流云之外无事可干,久而久之,我也会习惯的。我会等待着鸟儿飞过或白云相会,就像我在这里等待着我的律师的奇特的领带,或者就像我在另一个世界里耐心等到星期六拥抱玛丽的肉体一样。何况,认真想想,我并不在一棵枯树干里。还有比我更不幸的人。不过,这是妈妈的一个想法,她常常说,到头来,人什么都能习惯。
Du reste, je n'allais pas si loin d'ordinaire. Les premiers mois ont été durs. Mais justement l'effort que j'ai dû faire aidait à les passer. Par exemple, j'étais tourmenté par le désir d'une femme. C'était naturel, j'étais jeune. Je ne pensais jamais à Marie particulièrement. Mais je pensais tellement à une femme, aux femmes, à toutes celles que j'avais connues, à toutes les circonstances où je les avais aimées, que ma cellule s'emplissait de tous les visages et se peuplait de mes désirs. Dans un sens, cela me [111] déséquilibrait. Mais dans un autre, cela tuait le temps. J'avais fini par gagner la sympathie du gardien-chef qui accompagnait à l'heure des repas le garçon de cuisine. C'est lui qui, d'abord, m'a parlé des femmes. Il m'a dit que c'était la première chose dont se plaignaient les autres. Je lui ai dit que j'étais comme eux et que je trouvais ce traitement injuste. « Mais, a-t-il dit, c'est justement pour ça qu'on vous met en prison. - Comment, pour ça ? - Mais oui, la liberté, c'est ça. On vous prive de la liberté. » Je n'avais jamais pensé à cela. Je l'ai approuvé : « C'est vrai, lui ai-je dit, où serait la punition ? - Oui, vous comprenez les choses, vous. Les autres non. Mais ils finissent par se soulager eux-mêmes. » Le gardien est parti ensuite. 况且,一般地说,我并没有到这种程度。开头几个月很苦。但是我不得不努力克制,也就过来了。例如,我老是想女人。这很自然,我还年轻嘛。我从不特别想到玛丽。我是想到女人,随便哪一个女人,所有我过去认识的女人,想到我爱过她们的各种各样的场合,想来想去,牢房里竟充满了一张张女人的面孔,到处只见我的性欲的冲动。从某种意义上说,这使我的精神失常,但从另一种意义上说,这却使我消磨了时间。我终于赢得了看守长的好感,他总是在开饭的时候跟厨房的伙计一道来。是他先跟我谈起了女人。他跟我说这也是其他人所抱怨的头一件大事。我对他说我跟他们一样,我认为这种待遇不公正。“可是,”他说,“正是为了这个才让您坐监狱呀。” “什么?为了这个?”
“是啊,自由,就是这个呀。您被剥夺了自由。”
我从来没想到这一层。我同意他的看法,我说:“不错,不然的话,惩罚什么呢?”
“对,您明白事理。他们不懂。最后他们总是自己想办法。”看守说完就走了。